FNE Paris dénonce la forme que la ville de Paris impose dans la consultation sur la révision du Plan climat, ouverte du 15 septembre au 15 décembre 2022. Il s’agit en effet d’un dépôt d’idées, limité en taille ( 1000 caractères) et en forme d’expression ( dépôt individuel et non par association) . Cela ne permet pas une contribution globale et argumentée, à la hauteur des enjeux.
FNE Paris fait des propositions concrètes, disponibles sur son site fne-paris.fr, envoyées aux élus et services concernés.
Nous proposons aux citoyens d’y apporter leur soutien.
Pour FNE Paris le plan climat de la ville de Paris doit se doter d’ objectifs chiffrés et d’une gouvernance élargie et renforcée, il doit concentrer ses efforts sur :
. les domaines de compétences et d’actions relevant de la ville (services et patrimoine, filiales aménagement et logement social )
.les moyens d’action réglementaires et incitatifs (PLU, chartes, financements)
. l’interpellation des acteurs (Etat,Région, Métropole du Grand Paris, Entreprises…) pour une meilleure efficacité.
Pour soutenir nos propositions et leur permettre d’être étudiées par la ville, votez pour notre contribution sur la page Décider.Paris
Rappel de l’historique du Plan climat de Paris
.Le premier Plan Climat a été voté, dans sa première version à l’unanimité lors du conseil de Paris du 1er octobre 2007.Le Plan Climat Air Energie territoriale (PCAET) a été adopté, dans sa version définitive, le 22 mars 2018 à l’unanimité par le conseil de Paris.
Ce que dit la ville de Paris : « Au niveau local, pour atteindre la neutralité carbone, l’équation est simple : il faut diviser par deux les consommations énergétiques de Paris et atteindre 100% d’énergies renouvelables en 2050. »
Sur le premier volet, la Ville de Paris travaillera en priorité à accompagner la rénovation des logements et à la réduction des transports les plus carbonés.
Pour atteindre 100% d’énergies renouvelables, la Ville tirera partie des avantages de son territoire et tissera des partenariats territoriaux pour soutenir et participer au financement de la production d’énergies renouvelables en dehors de son territoire. »
Les principaux volets et les 500 mesures concernaient: Énergie, Mobilités, Urbanisme, rénovation des Bâtiments, Déchets, Alimentation mais sont étaient aussi abordés: pollution de l’air, de l’eau, résilience face aux canicules, biodiversité, lutte contre les inégalités face à la transition énergétique et gouvernance associant les citoyens.
. Le PCAET est actualisé tous les 5 ans. La révision du Plan Climat a démarré par une phase de concertation ouverte du 11 octobre au 15 décembre 2022. L’objectif affiché : élaborer un plan d’action opérationnel à 2030 et faire “« plus vite, plus local et plus juste, pour atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050”. «
Balades urbaines sur le terrain et réunions locales sont organisées dans les arrondissements pour recueillir les remarques et suggestions des Parisiens/végétalisation, rénovations, isolation, espaces publics etc..
Les propositions seront étudiées en janvier 2023, votées le mois suivant, puis présentées au Conseil de Paris et au public avant d’être définitivement adoptées en 2024 pour ce qui sera le 4 ème plan climat.
les étapes de la concertation et la révision :
•Septembre à décembre 2022 : Concertation du public
•Janvier 2023 : Synthèse des propositions
•Février 2023 : Votation citoyenne pour les actions prioritaires
•Mars à mai 2023 : Rédaction de la première version du Plan Climat
•Juillet 2023 : Présentation de la première version du Plan au Conseil de Paris
Novembre à décembre 2023 : Consultation publique officielle de l’avant-projet de Plan Climat
Mars 2024 : Adoption définitive du Plan Climat 2024-2030
1. Nos constats et nos alertes
– Manque d’implication des élus et des services
Les directions de la ville ne sont pas impliquées dans le suivi : c’est l’agence d’écologie urbaine qui en est chargée et elle-même est intégrée à une direction de la Ville qui n’a donc pas autorité transversale sur les autres directions.
– Défaut de méthodologie
Il y a aussi défaut de méthodologie pour réaliser par exemple les mesures d’émission de GES ; on ne sait pas quelle est la consommation énergétique réelle de tous les bâtiments de la ville ( écoles, gymnases, piscines..)
– Manque de fiabilité de l’évaluation du Plan climat
La ville a publié un bilan à mi parcours 2018/2020 assurant que « les grands objectifs à 2020 du Plan Climat sont quasiment tous atteints ».
Elle édite chaque année un bilan «Bleu climat »
Nous regrettons l’absence d’indicateurs de suivi fiables de la réalisation des objectifs, dans les différents domaines comme la consommation énergétique des bâtiments de la ville et les besoins de rénovation (on est entre 30 à 50 % en dessous de l’objectif annoncé pour les rénovations thermiques), l’alimentation durable ( pas de marché global, chaque mairie d’arrondissement gère sa caisse des écoles), l’impact du tourisme sur le bilan carbone..
– Faible réalisation des objectifs
Par exemple:
. faible niveau de rénovation énergétique des bâtiments :
Entre 2014 et 2020 :
49 immeubles rénovés et 208 en cours pour le parc privé (total 257)
196 immeubles rénovés et 280 en cours pour le parc social (total 476)
Sur un parc total de 100 000 immeubles soit 0,73% du parc de logements parisiens
C’est conforme à ce qui se passe au plan national et à ce rythme il faudra près d’un millénaire pour avoir rénové l’ensemble des immeubles de Paris (1900 ans au plan national)
. les rénovations n’ont pas toujours pris en considération le confort d’été, elles ont surtout concerné l’isolation contre le froid. Le résultat c’est l’explosion du recours à la climatisation.
. Faible suivi des consommations post rénovation : il ya urgence que l’outil SPDE (Service public de la donnée énergétique) qui commence à se mettre en place à l’Agence Parisienne pour le Climat soit utilisé pour avoir une transparence sur les évolutions des consommations et qu’on arrête de se fier au seul descriptif ante rénovation.
. Faible prise en considération des ilots de chaleur urbaine (ICU):
Peu d’analyse (ou du moins rendues publiques) sur l’impact de la morphologie des bâtiments, de leur hauteur, de la nature des matériaux de construction, de la largeur des voies, etc. sur la formation des ICU.
Exemple :
Quid de la ventilation naturelle dans les rues étroites en fonction de la hauteur des immeubles et donc de la température vs les autres rues ?
Quid de l’impact des rues bitumées vs les rues pavées ? Cela a-t-il une incidence ?
– Faible prise en considération de la place de l’eau
L’eau joue un rôle encore plus important que les arbres pour lutter contre les ICU
Vidage des réservoirs d’eau non potable (exemple des réservoirs de Grenelle vidés depuis 2018 et inutilisés), absence d’innovation dans les utilisations (Cf recyclage pour certaines fontaines publiques), pas de retour d’expérience des expérimentations d’arrosage de chaussées en ENP, etc.Le risque c’est l’arrêt des fontaines publique en cas de manque d’eau,
– Absence de respect de la place et du rôle des arbres vis à vis du climat
Abattages trop fréquents au nom de constructions immobilières d’arbres de haute tige et de volume foliaire important.
Pas d’approche en Analyse du cycle de vie prenant en considération l’énergie grise et la déperdition de capture du CO2 liée aux abattages. Mériterait un système de mesure.
– Insuffisante articulation avec le PCAET de la Métropole du Grand Paris
Le PCAET de la MGP est plus ambitieux et intègre les impacts de l’urbanisme sur le climat, il indique par exemple l’obligation de compenser 1m² artificialisé par 1,5m² désartificialisé
2. Nos propositions
Gouvernance et indicateurs
– Mettre en place des indicateurs annuels fiables pour éviter affirmations péremptoires ou contestation systématique des chiffres affichés, à la fois globalement pour Paris et le périmètre sous gestion directe de la Ville
– Mettre en place un vrai »service public » de la donnée énergétique et utiliser l’outil de pilotage ENER SIG élaboré par l’Agence parisienne du climat et l’APUR pour estimer les gains en économies d’énergie à réaliser par immeuble sur Paris
Sobriété énergétique et rénovation des Bâtiments
– Travailler à une réelle massification de la rénovation énergétique
– Interpeller l’Etat pour revoir le dispositif juridique et financier d’incitation à la rénovation ( cf. s’inspirer du dispositif suisse) rénover les enveloppes de manière performante et utiliser une énergie décarbonée
– Cibler en priorité les bâtiments les plus énergivores et consommateurs d’énergie les plus carbonées
– Mettre en œuvre un suivi régulier des consommations après rénovation
– Imposer la prise en compte du confort d’été en même temps que les travaux de réduction de la consommation liée au chauffage.
-Lancer un véritable programme de rénovation énergétique des bâtiments publics dans une démarche d’exemplarité (par exemple rénover l’Hôtel de Ville comme la maire s’y était engagée il y a plusieurs années).
Amélioration du mix énergétique
– Accélération des réseaux de chaleur urbains en volume de logement raccordés et en % d’énergies renouvelables (de 53,3% en 2020 à 80% en 2030 et 100% en 2035)
-Développement des sources d’énergies renouvelables : géothermie et photovoltaïque notamment
-Promouvoir plus efficacement la substitution aux énergies fossiles dans le parc existant vers une source bas carbone
Limitation des constructions neuves et définition de règles sobres de construction dans le futur PLU bioclimatique pour prendre en compte l’impact climatique (émission de construction et émissions énergétiques)
– Demander systématiquement un calcul de l’Analyse du Cycle de Vie des bâtiments prévus
– Elaborer une charte avec les promoteurs à l’instar d’autres collectivités locales
– Limiter strictement la hauteur des bâtiments pour limiter les consommations énergétiques ( contre exemple de la Tour Triangle) abandonner grande hauteur/ tours
– Concevoir des appartements traversants pour favoriser le rafraîchissement nocturne
– Augmenter à 2,70 m la hauteur sous plafond pour favoriser le bien-être
– Tenir compte davantage des ombres portées pour réduire les besoins de chauffage en hiver.
– Interdire la climatisation dans les bâtiments comme en Suisse ( sauf hôpitaux, data center..) et prioriser pour toute nouvelle construction le rafraîchissement naturel
Favoriser la végétalisation des toits ou l’installation de panneaux solaires sur les toits terrasse en passant des contrats de performance énergétique (CPE) avec des collectifs citoyens (Enercitif).
– Stopper la densification de la Ville et travailler à l’échelle métropolitaine pour concevoir une métropole durable , intégrer dans le PLU bioclimatique la règle du ZAN ou du ZAB, sanctuarisation de la nature à Paris ?
Redonner toute sa place à l’eau, préserver le cycle de l’eau, dans une optique de maximisation de la ressource
– Expérimenter le recyclage des eaux usées localement comme cela est recommandé par le rapport du CODEV de la Métropole,
– Réouvrir le canal Saint-Martin jusqu’à la Bastille pour créer un ilot de fraicheur
Remettre en eau les réservoirs d’Eau Non Potable comme Grenelle.
– Réutiliser les eaux brutes, n’arroser les parcs publics que la nuit et lancer une campagne d’explication auprès des propriétaires d’EVP pour qu’il en aille de même afin de limiter l’évapotranspiration.
– Poursuivre la création systématique de mares dans les jardins publics et recommander leur création dans les EVP (au-delà d’une certaine taille).
– Multiplier le mécanisme de brumisation sur les fontaines Wallace comme rue du Temple
– Installer des mini hydroliennes dans la Seine ( sous les ponts pour alimenter éclairage public)
Prioriser Mobilités douces et Transports collectifs
– Prioriser la piétonnisation en facilitant le partage apaisé de l’espace public (difficulté à faire coexister nouvelles formes de mobilités , interdire trottinettes en libre service)
– Renforcer la qualité des transports publics et le renouvellement du matériel( cf retard matériel Ligne 12 métro, nouvelle rames double niveau RER B, renouvellement des bus propores) pour favoriser l’abandon des véhicules privés ( NB la ville de Paris abonde le budget de IDF Mobilités à hauteur de 30%)
– Favoriser report modal et pistes cyclables
– Développer les zones de vitesse limitée ( 30km/h) c’est déjà fait ?
– Limiter l’accès à la ville des véhicules privés de gros tonnage ( cf proposition européenne)
– Faire appliquer la ZFE zone à faible émission
– Renaturer les rues à faible trafic
– Favoriser logistique propre du dernier km
Sanctuariser la nature à Paris et développer la place de la nature en ville, et avant tout celle des arbres
– Donner la priorité à la pleine terre comme base de la végétalisation et moyen de lutte contre les îlots de chaleur en été
– Préserver systématiquement les arbres et espaces verts dans les parcelles privées
– Prévoir des réserves pour création de nouveau espaces verts et le développement d’espaces verts ouverts au public
– Utiliser la préemption pour conserver des surfaces de pleine terre et des espaces verts et contribuer à une désartificilalisation indispensable
– Arrêter de commencer par abattre des arbres pour les projets d’aménagement ou de rénovation et mettre en pratique la séquence « éviter-réduire-compenser »: ex quai d’Ivry, Porte de Montreuil, ..
– Favoriser l’apport naturel d’eau en pied d’arbre en évitant les sols moins perméables
– Développer les plantations d’alignement plutôt que les pseudo forêts urbaines
– Favoriser la régénération naturelle dans les bois
– Créer de nouvelles réserves strictement dédiées à la biodiversité dans les bois
– Inciter au développement de la pleine terre et à la végétalisation des espaces privés avec plantation d’arbres
Donner des droits à la nature
– Lancer un processus pour donner des droits à la Seine et aux bois parisiens ( cf Wild Legal défense juridique de la Nature cf Costa Rica)
Mettre en évidence l’impact de la valorisation des Déchets/climat
– mettre en évidence l’impact sur le climat la démarche tri, recyclage, valorisation
– favoriser mécanisation du ramassage des ordures
– exiger chantiers bas carbone et valoriser les déchets de chantiers
– rendre incitative la taxe Ordures ménagères en fonction du volume de déchets produits rapporté au nombre de personnes au foyer
– favoriser l’économie circulaire et les ressourceries
Renforcer le rôle de l’alimentation durable et son impact sur le climat
-Mieux informer sur l’empreinte carbone de l’alimentation (18%) cf marchés publics
-Favoriser circuits courts, agriculture régionale, évaluation de l’agriculture urbaine
Mieux articuler le plan climat avec le PCAET à l’échelle métropolitaine
– harmoniser les règles pour encadrer les projets et prévoir les compensations à l’artificialisation, à l’échelle de la parcelle
Rénover la gouvernance du Plan climat
-Clarifier les compétences de la ville par rapport à celles de l’Etat, limiter le plan climat à ce que la ville peut faire avec des objectifs chiffrés
-Ouvrir plus largement la gouvernance du plan climat et favoriser l’implication des associations dans le suivi
-Favoriser la formation et la mise en mouvement des élus et des services sur la thématique du climat avec des indicateurs et des plans d’action
-Amplifier la formation, le suivi (par des enquêtes annuelles par exemple) et la mise en mouvement des citoyens et des différents acteurs (notamment les entreprises, les associations, les copropriétés, …) avec des éco gestes, des indicateurs et des plans d’action
-créer une instance de coordination du Plan climat auprès de la Maire pour obliger les adjoints et les directions à s’impliquer plus fortement dans la mise en oeuvre du Plan et avoir une prise en compte des impacts climat dans tous les projets
– S’assurer que les acteurs de la transition aient les ressources et la montée en compétence indispensable (exemple de la rénovation énergétique, transformation des mobilités, …)