Donner son avis sur la modernisation de la gare d’Austerlitz est important : l’enquête publique sera close au 31 juillet malgré la demande par les associations de report de la date d’enquête. Voir en fin d’article les liens pratiques.
Vous pouvez bien sûr vous inspirer de notre avis et de ceux qui sont déjà sur le registre d’enquête.
Avis défavorable de FNE Paris
Enquête publique : modernisation de la gare d’Austerlitz et construction de l’immeuble A7/A8, Paris 13ème.
Le projet présenté à l’enquête publique s’appuie sur le plan directeur d’aménagement établi il y a 10 ans , en juin 2010 , suite à la consultation lancée par la SEMAPA et SNCF sur l’ensemble du secteur Gare.
L’idée affichée est d’intégrer la gare dans la Ville et de constituer un nouveau quartier en développant un pôle associant activités économiques (tertiaires, commerciales, hôtelières), services aux voyageurs, logements, infrastructures fonctionnelles, en lien avec son environnement immédiat (hôpital, jardin des Plantes…).
En réalité il s’agit, selon nous, et comme pour tous les autres projets de gares parisiennes, de réaliser des opérations financières de promotion immobilière , sous prétexte de moderniser la gare ou l’ensemble des fonctionnalités propres à l’activité ferroviaire et à l’intermodalité.
Nous émettons donc un avis défavorable au projet soumis à l’enquête publique.
Deux points centraux expliquent notre position:
1-une enquête publique au coeur de l’été, à la sortie du déconfinement est un déni de démocratie: malgré la demande en date du 23 juin adressée au Préfet de Paris par certaines associations dont SOS Paris et ADA 13, membres du comité permanent de concertation de la ZAC Paris Rive Gauche et de FNE Paris, l’enquête publique se déroule du 29 juin au 31 juillet.Une fois de plus un projet central et de grande ampleur ne bénéficiera pas des conditions optimales de communication et d’accessibilité à l’information pour les parisiens. Par ailleurs, le périmètre de l’enquête est une fois encore restreint à Paris alors que les communes limitrophes ou plus lointaines sont fortement impactées et ont leur avis à donner sur ce sujet d’importance pour tous les Franciliens.
2-le projet présenté est issu d’un modèle urbain dépassé, en contradiction complète avec l’accélération actuelle de la crise climatique. La crise sanitaire actuelle rend nécessaire un autre modèle urbain.
Plus de dix années ans se sont écoulées depuis les premières présentations du projet et son évolution vers la densification extrême du bâti augmente les impacts environnementaux négatifs au lieu de les atténuer : ilots de chaleur, congestion des transports, bruit.. et nuit fortement aux éléments patrimoniaux situés à proximité (Hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Muséum d’histoire naturel et halle de la gare d’origine ). Le projet actuel ne prend pas en compte la dégradation de situation environnementale et ne propose aucune solution permettant d’y faire face.
Nous nous appuyons sur l’avis de l’Autorité environnementale qui a pointé les principaux risques environnementaux du projet:
-l’augmentation des nuisances liées à la circulation routière et aux conditions de desserte du quartier et de la gare augmentée par ce nouveau programme ;
-l’accroissement des émissions de gaz à effet de serre;
– l’insuffisante adaptation au changement climatique et notamment la prévention des îlots de chaleur urbains;
– la gestion problématique des déchets générés par le projet immobilier notamment pendant la phase d’exploitation et à proximité d’autres chantiers ( Tours Duo, Massena Bruneseau)
– le caractère inondable du secteur lors de grandes crues de la Seine.
Au vu des enjeux de santé publique actuels, il est anormal de ne pas trouver dans le dossier les éléments suivants :
- une quantification des émissions de gaz à effet de serre en phase chantier et en phase exploitation et la démonstration de l’inscription du projet dans l’objectif de neutralité carbone de la Ville de Paris pour ses grandes opérations d’aménagement
- des solutions intégrées pour limiter les nuisances sonores au niveau du bâtiment traversé par le métro aérien
- les informations relatives à la consommation d’énergie et à la production et à la consommation d’énergies renouvelables des bâtiments de l’ilot A7A8
- la compatibilité du projet avec les objectifs de tri et de valorisation du plan économie circulaire de la ville de Paris.
- la description des travaux de modernisation de la gare et les dernières données disponibles sur les hypothèses d’évolution des déplacements à échéance 2025, 2030 et 2040
- les simulations de trafic et l’impact de l’accroissement des trafics sur les temps de déplacement ;
- les impacts de ce programme sur les communes limitrophes
- la conformité avec les orientations et engagements des plans Climat, Biodiversité, Métropolitain de l’Habitat, accords de Paris, zéro artificialisation
Par ailleurs la massification du projet par rapport aux esquisses de 2007 est problématique: non seulement elle dénature fortement le site patrimonial mais elle augmentera de manière importante la congestion du quartier.
Les éléments fournis dans le dossier sont insuffisants pour apprécier l’intégration urbaine du projet et son effet de masse sur les environs, peu de vues, de perspectives.
La hauteur ( jusqu’à R+10) des bâtiments et la densité du projet utilisent au maximum les possibilités offertes par le PLU de 2016 dont nous dénonçons par ailleurs la dérive sur-densificatrice sur Paris. Il est tout à fait regrettable que les bâtiments du projet dépassent la hauteur de la halle de la gare et écrasent les perspectives, en niant et endommageant la valeur patrimoniale du site.
La justification de l’importance du programme n’est pas développée et ne présente pas au public les variantes étudiées ou les alternatives possibles.
Le projet prévoit 52 146 m2 de bureaux en pleine gare alors même que l’inflation de l’offre tertiaire à Paris et la quantité de bureaux vides sont manifestes et que l’après crise Covid annonce une réduction de la demande.
Les 24 652 m2 de commerces prévus à Austerlitz semblent disproportionnés comme pour la Gare du Nord. C’est plus du double des 10 000 m2 commerciaux de la Gare St Lazare dont l’impact sur les commerces de proximité du quartier n’a pas encore été mesuré. Or à Austerlitz les nouveaux commerces entreront en concurrence avec les rez de chaussée commerciaux prévus dans les immeubles longeant l’avenue Pierre Mendès-France et ceux préexistants le long du Boulevard de l’hôpital sans compter les marchés qui se tiennent 2 fois par semaine au droit du métro aérien. Par ailleurs ces nouveaux commerces sont positionnés pour une partie importante d’entre eux en milieu souterrain confiné inadapté comme on l’a vu aux crises sanitaires, dont on sait qu’elles risquent de se multiplier.
Nous constatons que comme pour le projet de la Gare du Nord, la création de ce pôle commercial et tertiaire a pour objectif d’aider la SNCF à financer la rénovation de ses gares, tandis que les services aux usagers et aux habitants sont logés à la portion congrue.
La part prévue pour les futurs logements, 11 563 m2 sur plus de 90 000m2 de programme, est très faible par rapport aux besoins des parisiens, en particulier pour le personnel hospitalier, question plus que jamais d’actualité.
S’agissant des espaces verts, sur les 8 000m2 de végétalisation annoncés, seuls 555 m2 de jardin sont prévus en pleine terre pour cet ensemble immobilier de plus de 90 000m2 ! Ce mini jardin est très loin des objectifs de 30% requis aux débuts de la ZAC Paris Rive Gauche ou même des 50% indispensables aujourd’hui pour que Paris diminue sa carence en espaces verts néfaste à la santé des habitants.
Situé en cœurs d’ilot dans la partie logements, ce jardin est de plus inaccessible au grand public ! Pour les autres espaces végétalisés, la terre se réduit à des substrats en jardinières allant de 1m 50 à 30cm d’épaisseur. Une fois de plus l’artificialisation est maximale contrairement aux objectifs annoncés publiquement par la ville de Paris. En outre l’exposition des plantations n’est pas optimale, les arbres seront à l’ombre et la priorité a visiblement été donnée à la création d’espaces rentables au détriment d’espaces de nature ouverts au public.
Enfin l’invasion de cubes commerciaux au sein des espaces publics entrave la déambulation des usagers et pousse à un consumérisme qu’un service public n’a pas à favoriser.
En fonction de tous ces éléments, nous demandons une remise à plat du projet afin de concilier la modernisation nécessaire des espaces ferroviaires et des services aux usagers des transports avec la sobriété environnementale que la situation climatique exige tout en prenant en compte les réels besoins des habitants en terme d’espaces de nature et de logements.
Christine Nedelec, Présidente de FNE Paris
Fait à Paris le 30 juillet 2020
Pour déposer votre avis, détails pratiques
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